Depuis la fin du printemps, la hausse de l’inflation fait les gros titres. La guerre pousserait les coûts de l’énergie à la hausse et les primes d’assurance maladie pourraient aussi prendre l’ascenseur l’an prochain. Dans la Berne fédérale, la gauche s’est préoccupée du sort des personnes à bas revenus. Le dernier jour de la session d’été du Parlement, Mattea Meyer, coprésidente du Parti socialiste (PS), a pu annoncer un succès : la décision, avec le Groupe du Centre, d’organiser une session extraordinaire en automne afin de protéger le pouvoir d’achat. Cette politique pragmatique de gauche a certainement davantage de sens que la proposition de l’UDC de réduire le prix de l’essence. Mais l’objectif de préserver le pouvoir d’achat est-il cohérent pour une politique rose-verte ? On peut en outre se demander quelles sont, dans une politique nationale dominée par le camp bourgeois, les stratégies des partis rose et vert pour une transformation de l’économie et de la société. Une transformation écologiquement et socialement durable, vu l’aggravation rapide de la crise climatique et la disparition effrénée des espèces.
Ne plus dépasser les limites planétaires
Au printemps 2021, Valentine Python a déposé une initiative parlementaire : la conseillère nationale verte souhaite ancrer le concept scientifique des limites planétaires dans la Constitution fédérale et dans la Loi sur la protection de l’environnement. Il s’agit de préserver tout ce dont l’équilibre est menacé : sols, forêts, océans, couche d’ozone, air, eau douce, biodiversité. L’interpellation précise qu’avec les intrants agricoles, l’industrie, la surconsommation, la déforestation, l’utilisation du sol et la combustion d’énergies fossiles, l’humain a provoqué une crise écologique bien plus grave que les seuls changements climatiques. L’extinction de masse du vivant est l’une des conséquences les plus dramatiques de la surexploitation de nos écosystèmes. Si l’initiative de Valentine Python trouve une majorité au Parlement, la Suisse devra élaborer une base légale en vue d’assurer un développement sûr et équitable de la société dans les limites planétaires.
Tel est aussi l’objectif de l’initiative pour la responsabilité environnementale lancée par les Jeunes Vert-e-s. Coprésidente du parti, Julia Küng explique dans l’entrevue ci-contre comment le découplage de la croissance pourra améliorer la qualité de vie.
Repenser la politique économique
Au cours de la dernière session d’été, les Vert-e-s ont déposé au Conseil national quatre autres interventions relatives à la (post)croissance, dont l’interpellation « La Suisse au-delà de la croissance » de la conseillère nationale saint-galloise Franziska Ryser. Elle y précise notamment que la croissance économique répond de moins en moins à des attentes telles que l’accroissement de la protection sociale, de la qualité de vie ou du plein emploi. Les indicateurs montrent même que dans les pays riches comme la Suisse, la qualité de vie diminue désormais avec la croissance. Raphael Noser, secrétaire des Vert-e-s pour la politique économique et sociale, l’explique ainsi : actuellement, la croissance de la productivité profite largement aux détentrices et détenteurs de capitaux ainsi qu’aux cadres supérieur-e-s des grandes entreprises, au lieu d’être consacrée à la réduction du temps de travail ou à l’augmentation des salaires pour la population à revenu faible et moyen. La croissance économique ne fait dès lors plus progresser le niveau de vie collectif, comme jusque dans les années 1990 – en tout cas dans les pays du Nord –, mais elle creuse l’écart entre riches et pauvres.
Franziska Ryser mentionne également dans son interpellation que les taux de croissance baissent depuis plusieurs décennies, ce qui inquiète de plus en plus la politique et l’économie, car plusieurs variables dépendent de la croissance économique. La conseillère nationale verte demande donc au Conseil fédéral de définir comment la Suisse peut faire face ou s’adapter à une croissance faible ou négative, et comment elle pourrait s’en affranchir.